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Wild Raven Adventure

The Pas (MB) à Buffalo Narrows (SK) / 1 juin au 20 juillet 2016

Mercredi le 1 juin au mercredi 20 juillet 2016

Le mois de juin commença en force à The Pas avec trois entrevues. Nous avons parlé tout d’abord avec Hannah de Canoeroots Magazine, puis Gilles Parent et son équipe sur les ondes du FM93 Québec dans le cadre de l’émission Le Retour de Gilles Parents. Nous avons par la suite terminée la journée avec Trent, du journal local de The Pas. Le 2 juin au matin, nous étions de retour sur la rivière Saskatchewan Nord. Notre ami Warren et ses collègues de travail nous ont reconduits jusqu’à la rampe de mise à l’eau. Nous avons bien commencé la journée avec eux. La bonne humeur était au rendez-vous. Encore un immense merci à Wescana Inn et toute son équipe pour nous avons permis de séjourner à The Pas.

Peu de temps après avoir quitté la ville, nous avons été très heureux de voir des activités scolaires traditionnelles se dérouler dans la réserve indienne Big Eddy Settlement. Nous avons vu des moniteurs enseigner aux enfants à pêcher à la ligne et au filet, ainsi que des activités de foresteries. Ce sont des notions qui leur seront certainement très utiles plus tard. Après avoir vu la misère sur certaines réserves, nous étions contents de voir un programme qui se rapproche des traditions autochtones. Ces activités peuvent aussi les aider à subvenir à leurs besoins dans le futur. Ce fut rafraichissant de voir cela, car le même matin, nous avons entendu une histoire triste. Une agente de sécurité de l’hôtel de Wescana Inn nous raconta sa jeunesse. Cette dame a aujourd’hui 54 ans. Sa mère biologique est Ojibwe et son père Crie. En très bas âge, elle a été prélevée de sa famille pour être placée en famille d’accueil jusqu’à ce qu’elle soit majeure. Elle n’était pas un cas isolé et c’était une façon de faire autrefois. Heureusement, c’est maintenant chose du passé et cette pratique n’est plus utilisée (à moins que le milieu familiale représente vraiment un danger pour la sécurité physique et psychologique de l’enfant). Ses parents adoptifs ont déménagés en Hollande et y ont vécus durant 15 ans. Elle dit ne pas avoir aimé son expérience, car tout ce qu’elle désirait était de pouvoir revenir auprès de ses vrais parents, des siens et de ses racines. Elle a reçu une bonne éducation et ses parents adoptifs étaient aimants. Mais, il persiste encore aujourd’hui un vide créé dans son coeur par l’arrachement qu’on lui a fait subir sans motif réél. Elle aurait voulu être élevée comme une Ojibwe/Crie auprès de sa vraie famille.

La rivière Saskatchewan Nord s’est avérée être plus ardue que nous l’avions prévu. Nous avons eu plusieurs journées consécutives de forts vents (entre 35 à 65 km/h) de face. De plus, le courant était toujours de plus en plus rapide et grandissant. Les berges de la rivière sont boueuses et le soir, il était parfois difficile de se trouver un emplacement pour dormir. Mais nous avons toujours trouvé un endroit qui convenait. Nous devions porter tout dans nos bras, y compris Jasmine. Cette boue n’a pas de fond solide et ne porte pas.

Les oiseaux y sont abondants et diversifiés sur la rivière. C’est là que malheureusement nous nous sommes rendus compte que nous ne connaissons pas beaucoup les espèces d’oiseaux. Nous avons dû voir huit sortes de canard différents, mais nous ne pouvons pas les nommer (mis à part le colvert). Les bernaches ont été l’espèce la plus en abondance. Nous avons vu aussi chevreuils, renards, loups, loutres, castors, … et beaucoup de traces laissées dans la boue par des orignaux et des oiseaux.

Plus nous avancions, plus les berges étaient escarpés. À certains endroits, le dénivelé était d’environ 25 à 30 pieds (surtout à l’intérieur des courbes). Puis, nous avons franchi une ligne pointillée apparassant sur notre carte et nous indiquant que nous venions de quitter le Manitoba pour entrer en Saskatchewan. Nous nous sommes remémorés toutes les belles rencontres faites au Manitoba et surtout les amitiés créées. Les manitobains ont été généreux et bons avec nous. Ça vaut la peine de le redire ... la devise du Manitoba (sur la plaque d’immatriculation des véhicules) dit vrai: Friendly Manitoba.

Nous n’avons pas été déçu de notre accueil en Saskatchewan, car le soir même où nous avons fait notre entrée sur le territoire, nous avons été reçu par Ken, Ted et son petit-fils. Ils nous ont invité à aller dormir à leur camp et ont planifié notre arrivée à Cumberland House (prévue le lendemain). Nous avions déjà vidé tout le canot et la tente était déjà montée. Nous avons donc décliné l’offre pour le camp, mais nous sommes allés revoir nos voisins le lendemain (nous étions sur la même île qu’eux qu’ils surnomment Paradise Island). Ken a pu nous expliquer aussi ce que nous avions découvert en chemin. Nous avons vu une ligne bleue accrochée à un arbre. À cette ligne, plusieurs esturgeons attachés par la machoire inférieure de façon à ce qu’ils puissent se nourrir et rester dans l’eau. Ken est celui qui a accroché ces poissons. Il est payé par le gouvernement (conservation et environnement) pour attrapé des esturgeons. Au trois jours, des agents viennent récoltés des données. Ils pèsent et micropucent ces poissons d’allure préhistorique avant de les relâcher. Ken est rémunéré par le gouvernement pour ses services. C’est une bonne façon d’utiliser le savoir-faire local tout en combinant la science et la protection de l’environnement.

Le 5 juin, ayoye!!! Nous n’avions que 20 km à faire pour se rendre à Cumberland House, ou plus exactement Pemmican Portage. Le courant était très fort. Il a fallu faire preuve d’astuce pour avancer. Le niveau d’eau était bas. Il nous aura pris 5 heures couvrir la distance. En plus, vent de 55 km/h +. Pas facile. Le seul avantage que nous avions était l’absence de moustique. Lorsque nous sommes arrivés à destination, Ken nous y attendait déjà. Il est allé voir son ami Kelvin qui nous invita à son tour à monter notre campement sur son terrain situé un peu plus loin. Nous pensions au début n’y rester que deux nuits au maximum, car nous devions récupérer deux paquets au bureau de poste (arrivée prévue le lendemain 6 juin). Hors, seulement une boite arriva le 6 juin. L’autre arriva seulement le 8 juin. Comme le hasard fait bien les choses, ce délai nous permis de faire de superbes rencontres. Tout d’abord Kelvin et Wilma, nos hotes. Ils nous ont accueillis comme des amis, nous ouvrant la porte de leur maison pour prendre une douche. Ils nous ont aussi laissé de la nourriture fraiche telle que melon d’eau et salade. Quelle joie de croquer à pleines dents dans un melon frais et juteux.

Wilma travaille à l’école de Cumberland House. Elle nous a d’ailleurs invité à assister aux mini-olympiades qui ont eu lieu le mercredi 8 juin. Pierre y est allé seul, car je suis restée avec Jasmine. J’en ai profité pour continuer l’écriture de notre livre. Wilma fait beaucoup pour les jeunes. Elle a un dur travail d’encadrement sociale et elle doit rencontrer les parents pour les inciter à changer leurs habitudes de vie afin d’aider leurs jeunes et la nouvelle génération. Son travail ne se limite donc pas seulement aux étudiants, mais va bien au-delà. Durant les mini-olympiades, Pierre a été fasciné de voir qu’un jeu traditionnel crie avait été incorporé aux mini-olympiades. Deux participants sont couchés au sol (à l’opposé) et s’affrontent avec une jambe. Ils doivent renverser l’adversaire. Le fait d’ajouter un jeu traditionnel dans les olympiades démontre un désir d’enseigner aux enfants une partie de leur héritage et de leur histoire. L’école met beaucoup d’emphase pour motiver les jeunes à réussir et grandir dans la bonne direction. Sur chacunes des portes de classes des professeurs, il y a d’inscrit une phrase inspirante, un mot d’encouragement. Comme dit Kelvin, nous avons tous une responsabilité envers notre communauté, nos amis, familles et notre propre vie. Tout commence par soi. C’est à nous d’être un modèle et prêcher par l’exemple.

Oui, il y a des problèmes ici aussi, comme partout ailleurs. Mais nous avons été grandement impressionnés par la volonté de faire avancer les choses et aider son prochain. Un ami de Kelvin, Allen, a créé un jardin communautaire lequel est accessible aux différentes familles de la communauté. Il entretien le tout gratuitement, fourni la terre et l’équipement. Allen a aussi construit une patinoire extérieure à ses propres frais pour permettre aux jeunes de pouvoir jouer au hockey.

Sur les murs de l’école, plusieurs personnalités locales qui ont connues un succès dans une des différentes sphères du monde sportif, artistique, académique (juge, avocat, policier de la GRC, professeurs, athlète, etc.) sont représentés. Solomon, cousin et ami de Kelvin, figure sur ce mur. À proximité de l’école, une phrase peinte sur un panneau: “Before the winner, there was a beginner”. Ça fait réfléchir à notre monde aujourd’hui qui va si vite. Les jeunes en générales veulent tout avoir et vite sans y mettre trop d’effort. L’ère des communications rapides et des jeux vidéos; le phénomène de l’enfant-roi; tout y est pour pousser les jeunes à vouloir plus et plus rapidement. Depuis notre départ de Winnipeg, nous avons visité des communautés qui ont des difficultés supplémentaires, telles que suicide, drogue, alcool, perte du sens de la communauté, perte de valeurs et recherche d’identité. Cette phrase simple et vrai s’applique à nous tous et à plusieurs aspects de notre vie … tout gagnant a un jour été un débutant. Avant d’arriver à notre but, il faut travailler et déployer des efforts. Il faut se rappeler d’où on vient et prendre les actions nécessaires pour arriver aux résultats escomptés. Tout ne tombe pas du ciel. La facilité n’est pas toujours donné à tous. On se sent fier lorsqu’on réalise nos objectifs … encore plus lorsque nous avons dû bûcher pour y arriver.

Kelvin travaille pour la ville. Il a aussi participé à plusieurs courses de canot dans le passé. Il était très doué. Pierre a d’ailleurs eu le plaisir de sortir en canot avec lui. Avec son cousin et ami Solomon Carriere, ils ont remportés plusieurs prix. Un soir, alors que nous demandions à Kelvin si nous pouvions l’interviewer au sujet des courses de canot et ce qu’elles ont représentés dans sa vie, il a invité Solomon et sa conjointe Renee à se joindre aux groupes. C’est alors qu’une entrevue vraiment inspirante s’est produite avec nos deux pagayeurs. Solomon a longuement été dans le circuit de course allant même jusqu’à Shawinigan (QC), au Yukon et à Hawai. Ils nous ont aussi parlé du passé, de leur ancêtres et de l’importance du canot dans leur vie. Il fallait être bon pagayeur pour pouvoir chasser et subvenir à ses besoins. Il fallait se déplacer rapidement et sans bruit. Le père de Solomon lui répétait souvent qu’il ne voulait pas entendre le bruit de la pagaie dans l’eau. Le plus fort de leur carrière de coureurs s’est déroulée dans les années 90. Kelvin et Solomon nous ont enseigné leur technique de pagayage. Nous l’avons mis en pratique depuis et nous devons avouer qu’elle est très efficace et nous avons même augmenté notre vitesse de déplacement. La preuve que nous n’avons pas terminé d’apprendre et de peaufiner notre technique.

Nous avons aussi beaucoup appris sur Cumberland House (la plus vieille colonie de la Saskatchewan, enregistrée en 1774). Elle a fêté ses 125 ans d’enseignement l’an dernier. Nous avons pu voir la première école qui en fait ne pouvait probablement pas accueillir plus de 10-12 personnes. Le York boat, bateau utilisé par la Compagnie de la Baie d’Hudson était le mode de transport par excellence dans la région. Le grand-père de Solomon était capitaine de York boat. Solomon fait revivre la tradition aujourd’hui en enseignant son utilisation. C’est complètement hallucinant de savoir qu’alors que le York boat était encore utilisé pour ravitailler les communautés plus éloignées, Neil Armstrong posait le pied sur la lune. D’un côté l’innovation, la technologie et la découverte spatiale et de l’autre, la survie et un mode de transport utilisé durant des siècles. Le canot, les chiens de traineau, le york boat … tout avait une raison d’être jadis et en a eu une jusqu’à tout récemment.

Bien que Cumberland House ne soit pas une grosse communauté, elle a bercé et fait grandir de braves hommes qui se sont enrolés volontairement pour lutter dans le cadre de la Première et Deuxième Guerre Mondiale, dont un des oncles de Solomon. Ce dernier convaincu plusieurs de ses amis à s’enroler avec lui. Ils ont dû parcourir le trajet à pieds jusqu’à The Pas. Après leur école de recrut, les hommes ont décidé de revenir voir leur famille avant le grand déploiement. C’était l’hiver. Ils ont trouvé un transport jusqu’à The Pas. Puis, ils ont convaincu un chauffeur de taxi de bien vouloir les reconduire jusqu’à Pine Bluff (situé un peu plus loin que Cumberland House). Puis qu’il n’existait pas de chemin pour s’y rendre, la voiture est passée sur plusieurs rivières dont la rivière Saskatchewan Nord. Roger Carriere, oncle de Solomon, le plus jeunes des frères, et grand-père de David (rencontré à Matheson Island) a raconté se souvenir avoir vu une grosse chose noire arriver sur la rivière. C’était la première fois qu’il voyait une voiture. Il était encore très jeune. Un autre oncle de Solomon était tireur d’élite durant la guerre. Il a été atteint par balle dans la bouche. Il a été défiguré, mais a survécu à ses blessures. Anecdote assez particulière: tandis que les oncles de Solomon luttaient en Europe avec les forces Alliées, un membre de la famille de Renee (conjointe de Solomon d’origine Allemande) participait à la guerre comme Brigadier Générale de l’armée Allemande. Sans le savoir, leurs familles se sont affrontées dans cette effroyable guerre. Et aujourd’hui, plus aucun camp n’existe et leurs familles se sont unies.

Le 10 juin, nous étions finalement de retour sur l’eau. La veille, nous avons dû attendre sagement en raison d’orage. Kelvin est venu nous conduire à la rampe de mise à l’eau sur le lac Cumberland, nous permettant ainsi que sauver quelques kilomètres de portage dans le village. Nous étions forts reconnaissants. Nous avons donc quitté un autre endroit fantastique où nous avons grandement appris sur l’histoire, le sport du canot, sur les Métis et la communauté Crie. Mais avant tout, nous avons surtout laissé dans notre sillage de belles rencontres et de nouvelles amitiés. Merci encore à vous tous!

Nous avons profité très bièvement du vent à la sortie de Cumberland Lake. Puis, vent de face jusqu’à ce que nous nous arrêtions. Nous avons eu de la pluie en chemin, beaucoup de pluie. Les gouttes tombaient avec aplomb et force. Nous avons dû avancer dans des vagues courtes et rapprochées qui diminuaient grandement notre allure. Quelques 30 km plus loin, nous avons trouvé un endroit où arrêter. Cela ne valait plus la peine de se battre pour avancer. Notre campement n’était pas idéal, mais nous avions fait notre mieux pour le rendre confortable.

Le lendemain, nous nous sommes levés sous un soleil radieux. Plus de vague et de vent. Plus aucun mouton blanc. Superbe. En tournant la pointe où était situé notre campement, nous avons constaté que nous étions maintenant rendu dans le bouclier canadien. Nous étions tous les deux supers exités à la vue de ces belles roches de granite. Nous nous sommes sentis comme si nous revenions à notre maison. L’eau était plus claire et le soleil faisait ressortir la profondeur et la couleur de l’eau de par ses rayons. Il me semblait que des lames lumineuses plongeaient dans l’eau translucide vers les abysses verdâtres. Puis nous avons fait notre entrée dans la rivière Sturgeon Weir. Ça commençait fort avec une série de rapides. Nous sommes arrêtés au quai de la petite communauté de Sturgeon Landing. Nous avons diné et nous nous sommes informés sur les prévisions météorologiques. 100% de pluie prévu pour le soir et le lendemain. Brenda, une toute petite femme souriante responsable au Sturgeon Landing Outfitters et qui se promène partout sur son quad, nous donna un immense sac de mais éclatés et du poisson frit. Après avoir parlé avec son fils, nous avons pris la décision de rester ici et de louer un camp pour dormir. Le dimanche, nous avons préparé de la banique en vue de notre long voyage sur la rivière aux nombreux rapides. En fin d’après-midi et début de soirée, nous avons assisté à un moment que nous pouvons qualifier de “National Geographic”. Nous avons été témoin d’un phénomène naturel et grandiose. Le ciel orageux nous a offert un concert de couleurs avec différente nuance de gris, de bleu ultramarine et de prusse, de rose, de doré, de violet, de blanc, … puis des éclairs et des formations nuageuses hallucinantes qui donnaient l’effet d’être si près de nous. Tout semblant bouger rapidement et avancer comme un rouleau compresseur sur nous. Nous sommes restés à l’extérieur à prendre des photos et filmer jusqu’à ce que la pluie ne nous force finalement à trouver refuge. Par la suite, le paysage est devenu scintillant offrant des éclats d’or et des couleurs chaleureuses sur une scène d’après-pluie. Vraiment magnifique.

Le 13 juin marqua ma première vraie journée de canot dans les rapides. Je mentirais si je disais être partie confiante et sûre de moi. Heureusement, Pierre était là pour me coacher. Après un début maladroit, j’ai commencé tranquillement à apprivoiser les rapides et les différentes techniques pour avancer dans une eau bouillonnante et tumultueuse. Nous étions fiers d’avoir fait 26,5 km la première journée. Le courant était fort et les rapides nombreux. De plus, le niveau d’eau était bas.

Les mouches sont très présentes et alimentent notre quotidien dorénavant. Lorsque nous sommes arrêtés en fin de journée, nous avons changé nos vêtements mouillés pour des vêtements secs. Les vêtements portés durant la journée ont été installés sur la tente moustiquaire afin de les faire sécher. Des centaines et des centaines de mouches ont pris d’assaut nos chandails, pantalons, bas. Lorsque les mouches sont reparties, nous avons récupérer des vêtements souillés par leurs déjections.

Le lendemain, la rivière était calme. Aucun frisou sur l’eau offrant une réflection parfaite des arbres. Le vent s’est finalement manifesté plus tard, mais avant son arrivée, nous avons dû porter notre Original Bug Shirt pour se protéger des millions de mouches et moustiques. Le dénivelé vers le lac Amisk était plus important. Nous avons eu du plaisir à relever les défis que la rivière nous a offerts. À un rapide, nous avons dû utiliser notre imagination. Un portage n’était pas possible, nous avons dû donc continuer par la voie de l’eau. Nous avons marché dans l’eau jusqu’en dessous des bras, fait la chèvre de montagne sur les crans rocheux et escarpés, fait de la cordelette, utilisé les “crazy-carpet” pour isser le canot sur une roche située entre deux lignes d’eau de courant déferlant. Dans le dernier élargissement avant d’arriver au lac Amisk, nous avons vu un série de bâtiments nous laissant croire qu’il s’agissait d’une pourvoirie. Le temps était lourd et le tonnerre se faisait entendre. Nous pouvions voir les cellules orageuses se déplacer et une autre se diriger sur nous. Nous avons donc traversé de l’autre côté de la rivière où nous avons rencontré Mary-Ann et Shirley. Mary-Ann nous invita à monter notre tente et profiter du confort des installations. Nous avons pu prendre une bonne douche et manger de la délicieuse soupe. Puis, nous avons eu du plaisir à aider Mary-Ann dans la cuisine. Elle avait un repas pour un gros groupe à préparer. Elle nous invita à se joindre à ce groupe bien particulier composé de gouverneurs, de chefs et ex-chefs des Premières Nations. Nous avons grandement apprécié notre soirée, car nous avons pu échanger beaucoup sur la culture, les enjeux sociaux-économiques, l’éduction, les traditions, l’identité, la spriritualité, le passé et le futur. Nous avons appris sur les tentes de sudations, leurs utilisations et fonctions. Vraiment très intéressant. Le conjoint de Mary-Ann, Jimmy, est un homme qui a gagné plusieurs prix dans les compétitions de levée de sac de farine (dans le cadre des compétitions du King Trapper). Il détient le record du plus gros poids avec 1056 livres de farine sur le dos. Sa photo figure d’ailleurs dans le National Geographic du mois d'août 1987. Aujourd’hui, il lutte contre un cancer du pancréas. Il semble toujours très solide et fort, mais la maladie et les traitements lui ont fait perdre 80 livres et il a beaucoup moins d’énergie. On lui souhaite de reprendre du mieux et que ses traitements viennent à bout de son cancer. Merci Mary-Ann et Jimmy pour le beau partage et la belle opportunité que vous nous avez offert. Nous avons beaucoup appris et ce fut un réel plaisir. Le matin de notre départ, nous avons aidé Mary-Ann dans la cuisine et déjeuné avec le groupe. Puis, Shirley et Noland nous ont remis de la nourriture parfaite pour notre diner.

Le lac Amisk fut bref, car nous l’avons traversé dans la même journée et avons poursuivi sur la rivière Sturgeon Weir par la suite. Les formations rocheuses étaient très intéressantes et tout était verdoyant. Pierre a entendu dire que jadis les autochtones auraient jeté un mauvais sort au lac pour éviter que les voyageurs et les blancs ne montent trop au nord sur le lac.

Nous nous sommes arrêtés ce jour-là à Spruce Rapids. Il y avait beaucoup de pélicans. Le débit d’eau, ainsi que le dénivelé du rapide nous ont forcés à faire un portage. Nous avons monté le campement dans la section la plus haute du sentier, près à redescendre pour se mettre à l’eau le lendemain (sous la pluie). C’est aussi à cet endroit que nous avons commencer à avoir de plus en plus de mouches. En fait, il y en avait de toutes les sortes: mouches noires, brûleux, maringouins, mouches à chevreuils et orignaux, ainsi que les no-see-ums. Les no-see-ums m’affectent particulièrement. On aurait dit que j’avais la varicelle sur les mains tellement j’avais des piqûres. Heureusement, nous avons des vestes anti-mouches The Original Bug Shirt. Une pièce d’équipement indispensable.

Tout au long de notre parcours, nous avons vu plusieurs endroits où la forêt avait brûlée. Nous avons vu différents stages de regénérations de la flore. Malgré la désolation qu’a laissé le passage des flames, nous y avons trouvé une beauté dans la force de la nature et dans les nouvelles pousses d’herbes, d’arbustes et de fleurs. Dans le lac Corneille, nous avons même vue une colline de granite rose complètement dénudée. En fait, seulement quelques arbres calcinés décoraient ce vallon qui donnait l’illusion d’être le cuir chevelu d’une personne qui fait de la calvicie. Le feu a aussi rendu les arbres fragile. Durant une nuit, nous avons entendu un arbre tomber (heureusement il était situé de l’autre côté de la rivière).

Sur la rivière Sturgeon Weir, nous avons parcouru de bonnes distances certaines journées et de moins bonnes d’autres jours. Tout dépendait des rapides, du niveau de l’eau, de l’intensité du courant et des portages. Le 17 juin, nous avons fait la rencontre des premiers confrères pagayeurs (Derek et son ami). Ce jour-là, nous nous sommes arrêtés pour la nuit à la fin du Birch Portage. Au-travers les orages de pluie, nous avons eu droit à deux reprises à de superbes arcs-en-ciel. Après toute cette pluie, des centaines de libellules ont pris d’assaut le ciel et ont tournoyé sans relâche nous offrant un beau spectacle de fin de journée. Notre séjour sur la Sturgeon Weir a été très pluvieux. Avec les portages, la cordelette, les rapides et les averses, il n’aurait pas été surprenant de se réveiller un matin avec des branchies. Nous étions toujours mouillés. Mais le matin du 18 juin, nous avons eu droit à une première journée sans pluie, mais surtout, un doux réveil lumineux. Déjà à 5:30 les rayons perçaient et donnaient des éclats dorés à l’intérieur de notre tente. C’est aussi ce jour-là que nous avons terminé notre parcours sur la rivière Sturgeon Weir. Nous avons fait l’entrée dans une série de lacs qui nous mèneraient vers Pelican Narrows, puis vers la rivière Churchill.

Le portage des rapides de Corneille s’est bien déroulé. C’était le première endroit où nous avons vu des rondins placés au sol permettant aux embarcations d’être tirées dessus pour traverser d’un cours d’eau à l’autre. Pour notre part, nous n’avons pu profiter de l’installation et avons dû portager traditionnellement. C’était particulier pour nous de voir que les gens ici voyage en chaloupe à moteur et peuvent traverser leur embarcation d’un plan d’eau à l’autre en utilisant des portages aménagés comme celui-ci. Ce n’est pas exotique pour eux et tout ce qu’il y a de plus naturel et normal. Pour nous, c’était nouveau et dépaysant.

Nous avions entendu parlé de Pelican Narrows à plusieurs reprises de façon très négative. Tous les gens rencontrés nous ont dit que nous ne devrions pas y arrêter et même passer le plus rapidement possible et s’en éloigner. Selon ce qu’on nous a reporté, il y aurait eu 7 meurtres l’an dernier dans la réserve. Le magasin Northern a aussi brûlé et les circonstances demeurent encore douteuses. Nous ne pouvons dire combien de personnes ont tenté de nous dissuader d’arrêter à Pelican Narrows, mais beaucoup, beaucoup de gens l’ont fait. Même des chefs de d’autres réserves. Nous avons donc suivi les conseils de tous ces gens et avons poursuivi notre chemin sans nous y arrêter. Nous nous sommes rendus à la fin du 4e portage après une journée dure physiquement (vents, courant, vagues, rapides et portages). Dans les différents portages, nous avons rencontrés des gens résidents à Pelican Narrows. Tous très gentils, souriants et intéressés par notre aventure. Il y a seulement un groupe de personnes que nous avons rencontré au 4e portage qui n’avait pas le goût de sociabiliser. Aucune salutation. Pas un signe. Seulement une question: avez-vous une arme? Je me demande si nous avions répondu “non” ce qu’ils auraient fait ou dit par après. Ils avaient des traits durs et n’avaient pas du tout le goût de rigoler. Un des hommes aurait pu faire peur à n’importe quel enfant (et peut-être même à quelques adultes) tellement son visage inspirait la peur et la colère. Puis, plus tard en soirée et juste avant que le soleil ne se couche, un groupe de jeunes est arrivé (16, 18 et 24 ans). Les jeunes hommes ont pris le temps de nous parler. Ils étaient pêcheurs et travaillaient très durs pour obtenir leur licence commerciale. Ils venaient pêcher dans le lac situé en amont du 4e portage. À tous les jours, ils devaient revenir à Pélican Narrows porter leur poissons. Ces trois garçons sont des décrocheurs. Ils ne désirent plus aller à l’école. La raison fût toutefois surprenante et je dois dire que nous comprenions pourquoi ils ne voulaient pas y retourner. Il y a un grave problème de gang et d’intimidation à l’école. Si tu ne veux pas rejoindre un groupe, on te menace. Mais ici les menaces sont vraies. Le cadet du groupe a été poignardé dans une jambe. Une grande cicatrice témoigne de la dureté du coup. Le second est sourd d’une oreille et aborde un rond de peau brûlée sur son front. Ne voulant pas rejoindre un groupe, l’agresseur a tiré un coup de feu à côté de son oreille, puis a déposer le bout du canon brûlant sur son front. Il n’est jamais retourné à l’école après cet incident de peur de se faire tuer. Le troisième et ainé n’a pas expliqué ce qui lui est arrivé. Mais un grand nombre de dents manquent dans sa bouche … ou plutôt peu de dents sont encore en place dans sa bouche. Ils ont dit: “Dans les films de cowboys et d’indiens, c’est toujours les cowboys qui gagnent. Ici, c’est les indiens qui gagnent”. Lorsqu’un problème arrive, la police arrive souvent trop tard et semble mal outillé pour enrayer le problème, au dire de nos jeunes pêcheurs. De plus, ces jeunes qui travaillent si fort pour vivre mieux se font escroquer par les leurs lorsqu’ils vont porter leurs récoltes. La bande ne leur accorde pas encore leur permis commercial. Donc, ce n’est que 50% de la valeur qui leur est accordé lors de la vente de leurs poissons à l’usine. Je crois ne pas à avoir à vous dire à quel point nous avons été chamboulés par cette rencontre. Nous sommes fiers des garçons parce qu’ils se prennent en main et font du mieux avec les outils qu’ils ont. Ils sont très travaillants et résiliants.

Le 21 juin, première journée de l’été, nous avons fait notre entrée dans le rivière Churchill. Un sentiment d’excitation nous a envahit. La Churchill est légendaire et elle représente une section importante de la traite des fourrures. Pour l’atteindre, nous avons traverser le portage de la grenouille. Ce portage a été nommé ainsi en raison d’un évènement qui est arrivée durant la période de la traite des fourrures. Les Cries, voulant se moquer de l’incompétence des Chipewyan à préparer les peaux de castors, ont acroché une peau de grenouille séchée à un arbre à l’entrée du portage. Le portage de la grenouille représente aussi le changement de bassins versants. Nous avons quitté celui de la rivière Saskatchewan pour entrer dans celui de la rivière Churchill.

Le 22 juin au matin, sur notre petite île de granite du bouclier canadien, j’ai préparé de la banique avant que nous reprenions le chemin de l’eau. Quelle journée se fût. Ce n’est qu’à 21:00 que nous nous sommes finalement arrêtés pour la nuit. Nous avons passé au-travers des rapides impressionnants. Nous avons fait beaucoup de cordelette et à un moment, nous avons dû être un peu plus inventifs pour passer les derniers obstacles d’un rapide avant d’arriver au lac Keg. Pierre était devant et tirait le canot. Moi derrière. Nous avions un dénivelé de presque 2 pieds à passer. Alors que Pierre tirait et guidait le canot afin de le faire glisser sur un tronc d’arbre bien ancré de travers entre des roches dans un courant encore tolérable pour tenir pieds, j’étais derrière à pousser le canot tout en le soulevant au bout de mes bras. C’est bien pour dire, c’est seulement notre “jus de bras” qui nous a permis d’avancer au travers le rapide. Nous avons eu de l’eau au dessus du nombril. Sous un beau couché de soleil orange, nous nous félicitions de notre première journée sur la Churchill. Mais ce n’était qu’un début. Il nous restait encore bien du milage à faire. Nous avons fait beaucoup de cordelette, de marche dans l’eau et des portages sur la Churchill. Plus que ce qui était indiqué sur nos cartes ou que nous l’avions imaginé. Ce n’est qu’à Missinipe que nous avons pu voir un graphique représentant le niveau d’eau versus le niveau normal. Cette année, le niveau est très bas.

Nous avons passé quelques nuits sur une île située au milieu de rapides en raison du mauvais temps (près de Stanley Mission). À cet endroit, Pierre s’est amusé à pêcher. La pêche était très bonne. C’est tout juste si les poissons ne sautaient pas par eux-mêmes directement dans nos assiettes. Brochet et doré sont les principales espèces qui ont mordus à l’hameçon. Nous avons aussi découvert que Jasmine adore la pêche. À chaque fois que Pierre sort sa canne, Jasmine devient toute exitée. Fait intéressant et inusité, Jasmine aime lècher les yeux des poissons. Lorsque Pierre en attrappe un, elle se dépêche à le sortir de l’eau. Pierre décroche le poisson de l’hameçon, puis Jasmine le transporte plus loin dans les herbes où elle lui lèche les yeux. Elle ne le blesse pas durant le transport. Puis, elle retourne voir Pierre et attend la prochaine prise. Une fois, Pierre a attrapé le plus gros doré de sa vie. Environ 5 livres. Il était fier et il avait peur que Jasmine l’échappe durant le transport, alors il s’est occupé lui-même d’amener le poisson dans les herbes plus loin. Ce poisson était destiné à notre souper et ne serait pas relâché. Mais Jasmine s’est sentie vexée. À son inçu, elle est retournée prendre son trophée et l’a ramené à côté de lui, près de l’eau. Le doré n’a eu qu’à donner quelques coups de queue pour se laisser glisser sur la roche et retrouver sa liberté. Pierre n’a pas eu le temps de réagir. La belle prise était maintenant chose du passé. Pierre a payé pour ne pas avoir laissé la Jasmine jouer avec son poisson.

Une autre histoire de pêche: Pierre a perdu, contre un brochet, sa seule et unique cuillière “Red Devil” qu’il possèdait depuis plus de 30 ans. L’immense brochet avait tout arraché. Pierre était déçu. Après avoir remonté sa ligne avec une autre cuillière doré, il s’est remis à pêcher. À sa grande surprise et stupéfaction, c’est le même brochet qui a mordu. Cette fois-ci, il ne voulait pas le laisser filer et il réussi à le sortir de l’eau. Il récupéra donc sa “Red Devil” et tout son grément. Fait inusité, le brochet était si gros que la cueillière avait fait un flip complet dans son gosier (l’hameçon devançait la cueillière). Du jamais vu pour nous. Le brochet a été relaché et Jasmine n’a pas eu le temps de lui lècher les yeux. L’important n’était que de récupérer la cueillière et ajouter une autre histoire de pêche au répertoire de Pierre. Pour ceux qui connaissent bien Pierre, vous pouvez imaginer à quel point il peut raconter cette histoire colorée avec passion. Vous pouvez même sentir l’odeur du poisson lorsqu’il vous la raconte. ;)

Nous sommes restés finalement trois nuits sur cette île paradisiaque. Nous avions installé un campement confortable. Nous sommes demeurés au sec et à l’abri sous la bâche durant les fortes épisodes de pluie. Entre les averses, nous nous promenions sur les roches, allions voir les rapides ou tout simplement pêchions au grand plaisir de Jasmine. Un soir, j’ai aussi vu le plus gros castor que je n’avais jamais vu.

Au troisième jour, nous avons fait la rencontre de Jordan et de ses deux clients. Jordan nous apporta deux grosses assiettes de poissons fris et de fèves. Un plat bienvenue dans ce temps pluvieux et maussade.

Nous avons repris nos pagaies le dimanche 26 juin sous un soleil radieux. Puis, nous avons rencontré Gary et son équipe à Churchill River Voyager Lodge. Ils nous ont aidé à faire le portage … un portage facile sur un trottoir de bois à l’aide d’un quad et d’une remorque. Gary nous a aussi remis de la nourriture (pain, beurre d’arachide, oeuf et du melon d’eau). La veille, je mentionnais justement à Pierre à quel point j’avais le goût de manger du melon d’eau. Et bien l’univers à entendu ma demande et c’est Gary qui y a répondu. En direction de Stanley Mission, nous avons rencontré à nouveau Jordan. Cette fois, il était en congé. Il était accompagné de sa conjointe Jamie et de ses amis (qui nous ont d’ailleurs donné du Gatorade bien froid). Ils nous ont indiqué où nous pourrions camper, car nous voulions arrêter tout près de Stanley Mission pour pouvoir arriver tôt le lendemain (afin de pouvoir réaliser toutes nos commissions). C’est sur une île située près de Little Stanley Rapids que nous avons monté notre campement. En soirée, Jordan est venu nous voir pour nous dire de l’appeler lorsque nous allions arriver au village le lendemain. Il allait nous aider à trouver un endroit où camper.

Donc, tel que convenu, nous avons contacté Jordan à notre arrivée à Stanley Mission. En moins de 5 minutes, il était là et nous offrait de piquer notre tente sur son terrain. Nous avons donc pagayé pour contourner la pointe de terre sur laquelle siège la communauté et la réserve pour ainsi passer du côté ouest. Jordan nous attendait déjà près de la rampe de mise à l’eau. Il transporta tout notre équipement dans son camion jusqu’à sa demeure. Notre séjour avec Jordan et sa famille (sa conjointe Jamie, son fils Zackary et ses filles jumelles Memphis et Taylor) aura été une belle expérience culturelle enrichissante. La maison est située sur la réserve nous permettant de vivre un 24 heures d’immersion. Jordan nous parla des problèmes de vol et de vandalisme sur la réserve. Ce sont les jeunes qui seraient responsables des ennuis sur le territoire. Il s’attriste fortement de la situation. Les crimes surviennent principalement la nuit, mais peuvent aussi bien survenir en plein jour. Un couvre-feu est d’ailleurs en vigueur. À 22:00, la première sirène se fait entendre, puis à 23:00 le dernier avertissement. Jordan prend un très grand soin de ses enfants. Il est un père formidable et nous l’en félicitons. Nous avons pu témoingner de tout l’amour qu’il a pour ses enfants. Il souhaite le meilleur pour eux.

Nous avons beaucoup appris aussi sur la vie sur la réserve de Stanley Mission et sur ses enjeux et besoins. À cet effet, une foule de réflexions, de constatations et de notes seront approfondies dans notre livre. Nous tenons à remercier Jordan et sa famille pour la grande opportunité qu’ils nous ont offert, pour leur aide, leur accueil, leur générosité et leur hospitalité.

Le lendemain, Jordan est venu nous reconduire à la rampe de mise à l’eau. Nous avons dit au revoir à notre nouvel ami et sommes partis en direction de l’église anglicane Holy Trinity de Stanley Mission. L’église en située en face du village, mais de l’autre côté de la rivière. Anciennement, le village était localisé du même côté que l’église. Ce bâtiment est le plus vieux de la Saskatchewan. Sa construction s’est terminé en 1856. Dans les années ‘90, il y a eu une restauration. L’église est magnifique. Sur une base de pierre, elle a été irrigée en bois. Ses vitraux laissent pénétrer des chaudes et réconfortantes couleurs. Il flotte une atmosphère feutrée à l’intérieur. Les photographes s’en donneraient à coeur joie et passerait des heures à saisir les différents jeux de lumières. Dans le cimetière, les pierres tombales ont été entourées de clôtures et décorées de fleurs. Nous n’avions jamais vu cela auparavant. Chaque emplacement devient un espace privé et séparé du voisin. En face de la pointe de terre sur laquelle siège l’église, il y a une petite île qui servi jadis d’endroit pour envoyer les gens malades et atteints de la grippe espagnole. Plusieurs sont décèdés. N’oublions pas que ce virus eu le titre de pandémie en 1918-1919. 50 000 canadiens sont décédés sur les 21 millions dans le monde. Ceux qui ont survécu se sont échappés de l’île et sont allés se cacher au nord du village pour y vivre une existence à l’abri des regards.

Après une belle escale touristique, nous sommes repartis en direction de Missinipe. Nous avions été invités (via Facebook) par Churchill River Canoe Outfitters à venir leur rendre visite. Un bon lit douillet et un repas chaud avec toute l’équipe nous attendaient. Nous avons dû malheureusement couper court à notre journée en raison du tonnerre et des éclairs. Nous avons été chanceux, car les orages sont finalement passés de chaque côté de nous, sans nous atteindre. L’île sur laquelle nous sommes arrêtés était superbement aménagée pour recevoir des campeurs comme nous. Le seul hic, il y avait un écureuil sur l’île. Jasmine n’avait de yeux que pour lui. Nous n’avons pas beaucoup dormi en raison de son excitation.

Le mercredi 29 juin, nous avons quitté la petite île vers une section de chutes et de rapides où il y avait deux portages à réaliser. Lorsque nous y sommes arrivés, nous avons vu une pourvoirie et surtout, peut-être le moyen de réaliser un portage plus facilement. Le sentier près de la chute ne semblait pas du tout entretenu. Il nous aurait fallu dégager le sentier. Nous sommes donc arrêtés à la pourvoirie pour s’informer des possibilités de passer sur leur terrain pour faire le portage. Pierre a rencontré Randy Nelson, le gestionnaire des lieux et très sympathique et charismatique personnage. Il nous invita à profiter des installations de Twin Falls Lodge pour faire le portage, soit un escalier et un chariot motorisé sur rail. En haut, Randy nous attendait avec son quad et sa remorque. Quelle chance nous avons eu.

L’endroit est superbe et jouit d’un emplacement très privilégié et unique. De nouvelles cabines en bois rond ont été installées et il est prévu de continuer à remplacer tous les vieux batiments par des neufs. Randy nous a fait faire le tour du propriétaire en plus de nous offrir une sortie en bateau pour aller voir les Twins Falls (qui n’étaient pas sur notre chemin). Puis Randy nous offrit de diner avec toute l’équipe. Une belle atmosphère règne au sein du groupe et on doit avouer que la nourriture préparée par la cuisinière est phénoménale. Délicieux!!! Randy et Lorraine (sa conjointe) veille au bon fonctionnement des lieux. Randy est un officier retraité d’une longue carrière au sein de Pêche et Océans. Il a d’ailleurs écrit un livre sur sa carrière forte intéressante (Poachers, Polluters and Politics: A Fishery Officer's Career - Randy Nelson).

Ayant passé un peu plus de temps que prévu à Twin Falls Lodge, Randy pris le soin de contacter Ric de Churchill River Canoe Outfitters (C.R.C.O.) afin de l’aviser de notre retard. On dit ici que Ric aurait creusé lui même la rivière Churchill tellement il connait bien tous ses racoins. Cela fait plus de 40 ans qu’il opère à Missinipe. Il y est arrivé dans les année ‘70 et il est tombé en amour avec la région. On comprend pourquoi. À notre arrivée à Missinipe, nous avons été très bien accueillis par Ric, son fils Dan, sa fille Sarah et ainsi que l’ensemble de sa belle et dynamique équipe. En plus, un couple du Yukon arrivait en même temps que nous. Ce que nous ne savions pas, c’est qu’une amitié allait se créer rapidement avec Mike et Christelle avec qui nous partageons plusieurs valeurs et passions communes.

Les installations de Churchill River Canoe Outfitters (http://www.churchillrivercanoe.com/) sont tout simplement géniales. De type auberge, il est possible de dormir dans des cabines très coquettes portant toute un nom original. Puis, il y a la place de rassemblement, le Timber Frame où la cuisine, un salon et l’endroit de détente se trouvent (voir vidéo). Des aires de petit paradis comfortable, exotic et festif se dégagent de l’endroit. Nous avions l’impression d’être en vacances. La communauté est composé d’une vingtaine de personnes qui vivent ici à l’année longue. Durant l’été, des centaines de personnes se rendent à Missinipe, porte d’entrée sur la rivière Churchill. En plus d’offrir de l’hébergement, la location de canot et d’équipement, des repas lyophilisés pour votre aventure (et tout un menu complet selon vos besoins), Dan (le fils de Ric) s’occupe de faire et mettre à jour des cartes topographiques pour toute la région (et plus) avec une foule d’information non disponible sur les cartes traditionnelles. Les cartes sont extrêmement bien réalisées. Allez-voir sur : http://www.canoemapscanada.com/.

À notre arrivée, Ric nous a fait sentir comme chez nous. Nous avons adoré partager avec lui sur nos vies respectives, nos expériences, nos voyages de canot, sur le plein air et sur l’industrie du plein air, etc. En fait, nous avons échangé sur plusieurs sujets. Pierre et Ric ont tant de choses en commun. Les deux auraient pu parler durant des semaines si ce n’était pas du fait que nous devions repartir à un moment et que Ric avait une entreprise à s’occuper. Ric est un grand passionné. Il connaît très bien l’histoire. Il partage sans restriction ses connaissances. Il est un homme généreux. Sa famille est toute aussi attachante et les employés sont à l’image des valeurs que prône C.R.C.O. Un grand merci Ric pour l’invitation, l’accueil, le délicieux repas, la belle soirée, l’hébergement, ta grande générosité et toutes les informations transmises, ton aide et soutien et tout simplement ton amitié et hospitalité. Pagayeurs et voyageurs, rendez-vous chez C.R.C.O. C’est un endroit incontournable.

Comme dit précédemment, nous avons eu la chance que notre chemin croise aussi celui de Mike et Christelle. Christelle est d’origine française et cela fait 3 ans maintenant qu’elle est au Canada. Elle est en couple avec Mike depuis 2 ans. Ils se sont rencontrés au Yukon, où ils résident. Un couple vraiment attachant et au-devant des autres toujours là pour aider. Quelle joie d’avoir pu échanger avec eux des sentiments similaires sur la vie et notre monde. Mike et Christelle font beaucoup de canot de descente et d’eaux vives. Ils prêchent aussi par le vélo et le ski. Ils ont un rythme de vie de nomade et mordent dans la vie à pleine dents. Une belle amitié s’est créée durant ces deux jours. Ils nous ont offert le déjeuner et plein de bonnes choses à manger en expédition. Mais surtout et avant tout, nous avons passés des moments inoubliables avec eux.

Durant la soirée du 30 juin, un officier de la conservation et deux autres agents étaient en pleine mission pour repérer un ours qui était devenu une nuisance et un risque pour la sécurité des gens. Nous avons d’ailleurs vu l’ours plus tôt dans la journée près du batiment de la salle de bain. Il n’avait pas peur des humains. C’est seulement lorsque Jasmine a jappé qu’il a pris la poudre d’escampette. L’officier en charge avait entendu parler de Jasmine. Il était bien curieux de la voir travailler. Pierre lui offrit donc de partir avec eux à la recherche de l’ours et de laisser Jasmine faire le travail de pistage. Il faisait déjà noir dehors. Nous étions avec Christelle et Mike au TimberFrame en train de boire du vin et discuter. Pierre n’est revenu qu’environ une heure après avoir débuté vers 23:30. L’ours étaient rendus trop loin, les recherches ont donc été mise sur la glace jusqu’au lendemain.

Le jour de la fête du Canada, nous sommes allés déjeuner avec nos amis à la caserne de pompiers. À chaque année, la communauté prépare des crêpes, du bacon et des saucisses. Un gros 3$ par personne pour une immense assiette et du plaisir. Puis, de retour à l’auberge, Anthony (que nous avions rencontré la veille), nous a demandé s’il pouvait nous filmé et faire une entrevue. Anthony est originaire de la ville voisine à celle où j’ai grandi. Il est allé à la même école secondaire que moi. C’est fou comme le monde est petit!!! Anthony est producteur, photographe, vidéaste. Il voyage partout dans le monde pour filmer et créer des émissions sur des évènements sportifs. Cette fin de semaine-là, c’était le White Water Festival à Missinipe. Anthony est un garçon fort intéressant et talentueux. Il est très professionnel et sait comment capter des images sensationnelles. Il a une belle philosophie de vie et un bel avenir devant lui. On peut dire qu’il a déjà la fibre de nomade. Je crois que de nous avons rencontré, tout comme d’avoir rencontré Christelle et Mike, l’aura inspiré à se propulser vers de nouveaux projets avec sa copine. Présentement, il demeure en Nouvelle-Écosse. Mike et Christelle ont aussi réalisé une entrevue avec Anthony. C’était vraiment sympa.

À notre départ de Missinipe, Anthony nous a suivi durant un certain moment pour prendre des images de plus sous toutes les angles. Nous avons hâte de voir le résultat. Puis, nous avons continué notre périple sur la rivière Churchill. La prochaine section nous a faire marché beaucoup plus que prévu. Le niveau d’eau étant toujours très bas, nous avons du sortir du canot à des endroits où nous n’aurions pas pensé avoir à marcher. Le premier long portage fût celui de Devil Rapids. 1.5km de marche que nous avons débuté vers 17h00. Étant complètement ravitaillé, nos sacs étaient pleins. Cela nous demandait donc de faire 7 allers et 5 retours au total pour réaliser le transport complet du canot et de l’équipement. Nous avions divisé la distance en 5 étapes (la cinquième étant la fin du portage). Faites le calcul. Ce n’est pas 1.5km que nous avons marché mais bien plus. Rendus de l’autre côté, nous avons trouvé une île parfaite pour monter le campement. C’est avec le chant des huards que nous avons soupé. Une superbe journée.

Le 2 juillet, nous l’avons passé détrempé. Plusieurs rapides, passes et portages ont été réalisés. Le paysage était beau. Nous étions toujours dans le bouclier canadien nous offrant une opportunité de trouver des endroits parfaits pour s’arrêter et pour camper. Le lendemain, nous avons effectué une bonne journée avec une belle distance considérant tous les portages faits. Nous avons bien travaillé ensemble pour faire avancer le canot au travers les obstacles. Nous étions satisfaits de notre progression et nos réalisations. On se sent toujours bien après une journée physique comme celle-ci où tout semble s’être passé sans anicroche et que les obstacles ont été franchis avec efficience. Tard en fin de journée, le vent s’est mis à souffler de plus en plus fort. Nous avons pu sortir la voile pour les derniers 4 km restant avant d’arriver à notre destination. Nous voulions aller dire bonjour à Bart et Vicky. Ric nous avait parlé d’eux. Ils gèrent un camp sur le lac Black Bear Island. Lorsque nous sommes arrivés, nous avons rencontré Bill et ses amis (qui nous ont d’ailleurs donner une contribution… merci à vous tous!!!!). Après avoir discuté un peu, nous sommes allés nous installés sur une île adjacente à celle du camp. Il commençait déjà à se faire tard. Il était temps pour nous de monter le campement et souper.

Le jour de l’Indépendance des États-Unis nous a offert un congé. Orage, pluie, forts vents et tonnerre nous ont permis de dormir plus tard et de faire une nouvelle fournée de banique. Assis sur nos chaises, sous la bâche à l’abri de la pluie, nous avons eu droit à une frousse mémorable. Le vent était fort et colérique. Derrière notre campement, nous savions qu’il y avait un arbre qui potentiellement pouvait tomber. Mais il penchait déjà amplement du côté opposé à nous et même si les racines se décrochait et que l’arbre faisait un rebond, nous serions en sécurité où nous étions. L’endroit où nous avions monté le campement était le plus sécuritaire sur cette île. Malgré tout, l’arbre en question s’est relevé comme par magie et a commencé à tomber vers nous. Il a roulé une fois de plus sur lui-même permettant de nous esquiver avant de ne s’effondrer au sol environ 10 pieds derrière la tente dans laquelle Jasmine dormait. Nous nous sommes regardés tous les deux avec de grands yeux. Comme on dit, c’était un “close call”. Quelques pieds de plus et ça y était pour nous et Jasmine.

Le 5 juillet, nous avons couvert une autre belle distance avec 53 km. L’avant-midi fut nuageuse et l’après-midi ensoleillé. Nous avons encore passé une série de rapides et de passes peu profonde avant d’arriver à Needle Falls et son portage. À notre grand étonnement, nous n’étions pas seuls. Un large groupe de jeunes accompagnés d’adultes était présent. Il s’agit de jeunes autochtones de l’Alberta et la Saskatchewan qui sont en voyage de canot (12 jours). Les organisateurs sont des pasteurs. L’instigateur du projet en est à sa 35 années. Le projet est super intéressant et une belle façon de faire vivre à ces adolescents un périple qui leur permet de se dépasser physiquement et mentalement. Ils apprennent beaucoup sur eux-mêmes et sont moins gênés de partager leurs expériences et émotions. Ils réalisent une activité qui demande le dépassement de soi et l’implication. Ils ne peuvent pas non plus se mentir à eux-même. Les efforts quotidiens demandent à ce qu’ils soient honnêtes envers eux-mêmes et les autres. Une très beau projet. Durant nos échanges sur les problématiques que vivent les jeunes des Premières Nations, ainsi que des solutions envisageables pour les aider, nous avons élaboré sur un concept qui me parle beaucoup. Je crois que notre identité personnelle n’est pas définie par notre communauté, notre famille, nos amis ou même la société. Ce que nous sommes part de nous et nous sommes responsables de nous définir nous même. Le monde expérieur devrait être là normalement pour nous aider et nous appuyer. Dans plusieurs cas malheureusement, les enfants ne sont pas encourager à devenir ce qu’ils pourraient être et exploiter leurs plein potentiel et talents. Malgré tout, la responsabilité nous revient de nous définir comme personne, choisir nos valeurs, trouver nos passions, se fixer des objectifs et trouver le moyens des réaliser. C’est plus facile à dire qu’à faire j’en conviens. Un moniteur me racontait justement qu’un étudiant très brilliant avait réussit tous ses examens de fin de secondaire. Il allait gradué. Mais volontairement, il ne sait pas présenté à un examen nécessaire pour obtenir son diplôme. Il aurait été le seul et premier membre de sa famille à obtenir un diplôme. Il ne voulait pas s’élever au-dessus des autres. Il ressentait la pression des autres membres de sa famille à être ce qu’on lui dictait d’être. Il devait être comme les autres. Le moniteur m’expliquait que dans les valeurs de la plupart des communautés autochtones, il est important de ne pas s’élever au dessus des autres et de rester en communauté. Je comprends cette valeur. Toutefois je crois nécessaire dire ceci (car je l’ai vu dans d’autres milieux). Quant à moi, le faire de nivelé par le bas relève de la jalousie et d’une hypocrésie égoïste à vouloir garder un certain contôle pour ne pas paraître moins bien que celui ou celle qui sort de la masse. Au lieu, pourquoi ne pas vous-même réaliser vos passions. Donc chers jeunes, il est important de vous définir, de vous trouver et de poursuivre vos désirs et passions. Vous êtes les maîtres de votre bonheur et destiné. Écoutez le positif et oubliez le négatif.

Le mercredi 6 juillet, le ciel était gris et lourd. Il faisait froid. Nous avions honnêtement le goût de rester couchés un peu plus longtemps. Mais nous n’avons finalement pas écouté notre paresse. Nous avons même réussi à faire un départ rapide malgré le fait qu’il nous restait à compléter le portage de l’autre côté de Needle Falls. Après avoir dit au revoir aux moniteurs du groupe de jeunes (les ados étaient encore couchés), nous avons pris nos pagaies et avons avancé jusqu’aux prochaines rapides. Une fois bien engagés dans les rapides, je me suis dit que “crime de crime” j’aurais dû mettre la GoPro sur ma tête. Nous avons mi environ 45 minutes pour passer le rapide qui nous a demandé beaucoup de créativité, de persévérance et d’adversité. Je crois que nous avons tout fait et avons tout eu comme obstacle dans ce portage. Cordelette, marche dans l’eau de la cheville jusque sous les bras, escalade sur les parois, soulever le canot dans les dénivelés promoncés, couper des branches, rembarquer dans le canot en frolant le mur le roche pour passer un endroit trop profond, soulever des arbres et forcer le canot à passer dessous, faire faire de la contorsion à Jasmine, toiles d’araigné, cadavres de bibittes sur les roches, gros rouleaux rugissant et déferlant à un pied de nous, … La scène est difficile à décrire mais c’était incroyable. Nous étions complèment détrempés, mais souriants. Le soleil est aussi heureusement réapparût et nous a réchauffés. Par la suite, un dernier portage pour faire notre entrée dans le lac Sandfly.

Après le diner sur une île particulièrement jolie avec son granite, son lichens, ses fleurs et petits arbres, nous avons repris notre chemin. C’est alors que le jeu du chat et de la souris a débuté entre nous et des cellules orageuses. Nous en avons esquivés quelques unes, mais la dernière ne nous lâchait pas. Les éclairs illuminaient les nuages gris charbon. Nous avons donc coupé notre journée courte et avons trouvé refuge sur une île. Nous avons monté la bâche et Pierre a eu le temps de pêcher un poisson avant l’arrivée de la pluie (Jasmine a eu le temps aussi de lècher ses yeux).

Le lendemain, nous avons eu la chance de croiser d’autres canotiers. Au loin, nous nous demandions bien qui pourraient être ces gens. Un seul canot. Puis, nous avons remarqué que le canot était blanc et ponté. Au lieu de porter attention aux personnes dans le canot, nous continuions notre analyse du canot. Quelle ne fût pas notre surprise lorsque nous avons finalement reconnu Christelle et Mike. Quelle joie! Nous avons mi les canots côte-à-côte. Jasmine s’est déplacée sur le canot de nos amis et est allée dire bonjour. Elle s’est même couchée derrière Christelle. Nous avons parlé un bon moment en se laissant dériver avec le courant. Mike donna aussi à Pierre des leurres pour assurer une meilleure pêche. Mike et Christelle nous manqueront. Nous aurions bien aimé que nos chemins soient dans la même direction. Nous aurions pu passer quelques jours de plus ensemble. Malheureusement, ce n’était pas le cas. Nous sommes donc repartis.

Nous avons dû arrêter durant près de deux heures en raison d’orages. Nous avons monté la bâche et avons trouvé refuge dessous. Malgré cet arrêt, nous avons réalisé une bonne journée. Nous l’avons terminé avec les derniers rapides situés près du pont de la route 914 (au nord de Pinehouse). Fait cocasse, alors que nous faisions avancer le canot dans le rapides en utilisant la cordelette, des gens sur le pont nous criaient qu’il y avait un portage plus bas que nous aurions pu utiliser. Ce qu’ils ne savent pas, c’est que nous préférons de loin faire de la cordelette ou marcher dans l’eau. Car un portage, c’est toujours plus long à faire (même sur une courte distance). Vider le canot, tout transporter et remplir le canot … ça prend du temps.

Rendus au lac Sandy, nous avons fait deux kilomètres de plus pour se rendre sur une île. Nous avons dû couper quelques roseaux pour créer un endroit propice pour monter la tente. Jusqu’à maintenant, nous avions été toujours bien servis questions campement. Ce soir-là, il a fallu mettre un peu d’effort pour rendre l’endroit plus confortable et sec. Nous remarquons que nous sortons tranquillement du bouclier canadien. Il y a de moins en moins de grosses roches de granite. Le sable commence à apparaître, mais il n’y a pas encore de grande plage.

Le lendemain 8 juillet, nous avons trouvé notre grande plage de sable sur le lac Knee. Mais avant, nous avons dû naviguer dans les méandres du delta de la rivière à sa sortie dans le lac Sandy. Puis un long trajet à contre-courant nous a fait découvrir de nouveau paysage. Une odeur de putréfaction est apparue aussi à un moment. Nous avons compris plus loin que c’était des poissons qui étaient soit en train de mourir ou déjà morts et en décomposition. Nous en avons vu des centaines. Tous des poissons de fond. Le soir, nous avons rencontré Raymond, Philomène et leur gros chien King. Raymond croit que c’est la température de l’eau qui affecte ces poissons. Ils seraient plus sensibles que les autres espèces. Raymond et Philomène vivent à Patuanak, mais ont aussi un camp à Old England Settlement, anciennement un endroit où il y avait un poste de traite de la Compagnie de la Baie d’Hudson.

Le 9 au matin, nous devions refaire de la banique. Nous sommes donc partis plus tard. Nous avons franchi d’autres rapides et traversés complèment le lac Knee. Nous avons bien avancé, malgré les sept rapides et deux autres endroits où nous avons dû marcher avec le canot en raison du manque d’eau. Le courant était fort. Par une mauvaise manoeuvre de ma part, nous avons frappé une roche durant une traversée d’un bord à l’autre de la rivière. Heureusement, plus de peur que de mal. Le canot toutefois commence à ressentir le manque d’eau. Son fond est grafigné autant que nos jambes sont meurtries et éraflées. Nous avons terminé tard notre journée. Il était près de 21:30 lorsque nous avons soupé. Nous sommes arrêtés sur une île au beau milieu de la rivière où les castors règnent. Jasmine était folle et heureuse comme un poisson dans l’eau. Je crois qu’elle rêve d’attrapper un jour l’une des ces bêtes qui ont jadis été un enjeu économique durant une grande épopée d’exploration. Durant la journée, nous avons vu aussi plusieurs ours noirs, dont un de couleur cannelle. Il y a aussi un autre ours qui a traversé la rivière devant nos yeux.

Le lendemain, nous nous sommes rendus sur une île située en amont du portage du lac Dipper. Le portage pour ce rapide fut relativement facile. Il y a un chariot sur rail que l’on a pu utiliser. Nous avons tirer le canot sur la rampe fait de madriers espacés jusqu’au chariot. En raison du degré de la pente au départ, nous en avons sué un bon coup pour réussir à décoler la plateforme. Une fois partie, ce fut un jeu d’enfant. De l’autre côté, il y avait une verchère. Relique du passé, elle était équipée de la dernière technologie en frais de moteur (à turbine). Nous avons pu voir ces embarcations en action le lendemain dans les rapides et c’est avec grâce qu’elles remontent le courant, nez dans les airs. Elles semblent flotter dans l’air.

Le 11 juillet marqua l’utilisation de notre cinquantième carte topographique depuis notre départ de Winnipeg. Un grand merci encore à Reprografic qui a fait l’impression de toutes les cartes que nous aurons besoin durant nos 20 mois d’expédition. C’est aussi ce jour là que nous arrivâmes près de Patuanak. Nous avons trouvé une plage de sable où nous sommes arrêtés pour la nuit, à environ 2 km du village. Le lendemain, nous sommes allés au Northern pour pouvoir faire l’achat de quelques aliments manquant, tel que gruau, sucre et pain. Nous y avons rencontrée Fiona, gestionnaire du magasin. Les magasins Northern appartiennent à la North West Company, laquelle existe depuis le temps de la traite des fourrures. Elle a toujours pour mission de rendre disponible aux communautés éloignées des biens et services essentiels à la vie quotidienne.

Puis, deux autres petits rapides et nous avons fait notre entrée dans le lac Île-à-la-Crosse. Une grande joie s’est emparé de nous, car nous pouvions dire que les rapides de la rivière Churchill étaient maintenant derrière nous. Il ventait très fort ce jour là. Assez pour sortir la voile. Nous avons couvert une belle distance grâce à celle-ci. En après-midi et fin de journée, le vent était devenu un peu plus fort, mais ce sont les vagues qui étaient devenues réellement problématiques. Vagues de 8 pieds déferlantes et courtes. Train de vagues rapide et de biais avec notre azimut. Nous voulions continuer à longer le côté ouest du lac, mais la nature en avait décidé autrement. C’est à Little Gravel Point que nous sommes arrêtés du côté est du lac et il était temps pour nous de rentrer au bord. L’eau a passé sur le pont à quelques reprises et le canot partait souvent en surf. Lorsque la vague était rendue au milieu du canot, les deux extrémités de notre embarcation flottaient dans le vide et Pierre perdait tout contrôle et avait de la difficulté à barer. Avant que les vagues ne soient trop forte, mais avions un allume moyenne à 10 km/heure. Nous avons même eu des pointes à 12 km/heure.

Le 13 juillet, nous étions contraints à demeurer sur place. Le vent soufflait avec la même intensité et les vagues avaient même augmentées. Cela nous a permis de se reposer un peu, de cuisiner et inventer de nouveaux plats avec les aliments en vrac qui nous proviennent de Happy Yak. Nous mangeons bien et diversifié. Ce midi, pizza aux légumes & poulet et croustade aux fraises. De plus, les petits fruits commencent à sortir. Nous avons pu récolter des framboises. Bientôt, nous pourrons mangé des baies de Saskatoon (https://en.wikipedia.org/wiki/Amelanchier_alnifolia). Jasmine, elle, a déjà décidé qu’elles étaient assez mures pour en manger. Sans lui avoir appris comment les récolter, elle s’est mise à sélectionner les plus mûres et se nourrir à même les arbustes. Elle recueille les fruits du bout des lèvres sans toucher aux feuilles, ni faire tomber les autres fruits. Nous nous sommes imaginés que les ours aussi mangent ainsi leurs petites fruits.

Le 14 juillet, nous avons fait une longue journée avec 80 km de lac et de rivière. Nous sommes arrivés au lac Churchill (la source de la rivière Churchill), en passant par île-à-la-Crosse, en soirée. Peu de temps après avoir monté le campement, le soleil se couchait. Nous étions donc rendus à Buffalo Narrows. Nous étions satisfaits de nos efforts et de pouvoir dire en couchant nos têtes sur nos oreillers que nous avons pagayé la rivière Churchill jusqu’à sa source.

Le vendredi 15 juillet était une journée toute particulière. Après avoir trouvé un endroit où loger au village, Kim, gestionnaire au Krows Nest Inn, est venue nous accueillir et offrir son aide pour le portage de notre matériel. Une dame super chaleureuse et généreuse qui nous a en plus offert sa voiture pour aller faire nos commissions. Puis en fin de journée, nos amis Jean-Robert et Odette sont arrivés après avoir conduit durant trois jours et demi depuis la ville de Québec. Quelle joie de les retrouver. Quel plaisir d’être avec eux. Ce fut le début d’une superbe fin de semaine. En plus des tâches que nous avions à accomplir, nous avons pu aller voir la rivière La Loche. Le niveau d’eau est bas, mais nous croyons qu’il nous sera possible de la pagayer du moins, jusqu’au pont de la route menant à Garson Lake. À cet endroit, nous avons rencontré une gang de personnes sympathiques demeurant à La Loche. Par la suite, nous avons pris notre diner sur les dunes du parc. Une longue plage de 10 km s’étend le long du lac Peter Pond. À notre arrivée, il y avait un groupe tout endimanché qui prenait des photos pour un mariage.

Nous avons fait aussi la connaissance de Ferg, un pilote d’avion de CL-215P. Ferg nous a d’ailleurs invité à venir visiter la base et un avion. Une belle opportunité que nous avons saisie avec grand plaisir. Ferg n’a pas été avare d’informations. Il est passionné par son métier. Ferg a aussi une autre grande passion, soit celle des Sasquatchs. Et oui, la légende est toujours belle et bien en vie et de ce qu’on dit, elle le sera davantage au fur et à mesure que nous nous rapprochons de la Colombie-Britannique. Ferg nous a fait grandement rire avec ses histoires. Il nous a bien avertis que si nous essayons d’appeler un Sasquatch, il faut être prêt à tout. Car peut-être nous l’aurons offusqué et il voudra nous battre ou nous lui aurons fait la cour. Dans tous les cas, ça peut faire mal. ;)

Le soir, Doug (propriétaire du motel) et sa conjointe Susan nous ont invité à souper avec eux. Un excellent souper passé en excellente compagnie. Nous avons grandement apprécié notre soirée. Merci à vous deux pour votre générosité.

Le lundi, nos amis Jean-Robert et Odette sont repartis. Presque quatre de jours de plus de route pour eux pour revenir à Québec. Nous sommes extrêmement reconnaissants, heureux et choyés qu’ils soient venus nous voir. Nous avons passé une fin de semaine magique avec eux. Merci aussi d’avoir apporter notre ravitaillement de nourriture et nos pièces réparées pour notre système de transport du canot (merci à Mireille et Dave pour la préparation du matériel, Christine d’Happy Yak et Michael pour avoir réparé notre essieux et avoir envoyé rapidement par la poste les pièces à Jean-Robert).

Ce jour là, nous avons aussi eu droit à un spectacle quasi privé des CL-215P. Par la suite, nous avons pris la décision de rester une journée de plus pour me laisser le temps de travailler sur le blog et prendre le temps de transférer des photos sur le web. Puisque Pierre n’avait rien d’autre à faire que me regarder travailler, il a offert son aide à Doug. Doug a beaucoup beaucoup d’ouvrage. Il ne doit pas beaucoup dormir durant la nuit. C’est alors que nous nous sommes dit que c’était à notre tour de redonner au suivant. Même si nous passons quelques jours de plus ici, nous serons heureux d’avoir pu aider Doug et d’avoir pu soulagé un peu sa liste de tâches à faire. De mon côté, au lieu de “rusher”, je peux prendre cette fois-ci plus de temps pour écrire. Il y avait plus d’un mois d’écriture à reprendre … ça fait beaucoup d’histoire! :) Nous sommes donc toujours à Buffalo Narrows en ce 20 juillet. Pierre construit deux terrasses, soit une avec toit et l’autre sans. Les travaux ont dû attendre hier après-midi en raison des orages. Pierre croit que si la météo coopère, il y a environ deux jours d’ouvrage. Après, nous partirons en direction de La Loche et poursuivrons notre exploration.


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